John Magufuli, président de la Tanzanie, a révélé lors d’une allocution les résultats de tests au Covid-19 envoyés à un laboratoire sous des identités de personnes fictives. En réalité, ces prélèvements «déguisés» avaient été faits sur chèvre, oiseau, essence, papaye…
Tout comme la chèvre, la papaye — alias «Elisabeth, femme, 26 ans», a été testé positive après avoir donné un échantillon provenant de son «intérieur», non souillé (pas la peau, beaucoup plus exposée). Les autres échantillons ont été qualifiés de «non-concluants», parfois «négatifs», comme celui de l’essence, alias «Djabil, homme, 30 ans». (Conséquence de ces petites farces, le directeur du laboratoire d’analyse national a été mis à pied.)
Après avoir relaté ces faits, le président, par ailleurs docteur en chimie, a conclu: «Maintenant, réfléchissons.»
Réfléchissons… Quel chef d’État parmi les grandes puissances s’est adressé à ses concitoyens en leur disant simplement: «réfléchissons»?
La suite du discours est un modèle de clarté, avec ce qu’il faut d’ironie, d’humour et d’autorité. Son argumentation sur l’inanité des tests au Covid fait appel à l’intelligence de ses concitoyens. Elle est simple sans être simpliste; elle stimule leurs capacités à raisonner et à élargir par eux-mêmes le champ à d’autres réflexions.Il est très fin, mais n’oublie pas son objectif de chef d’État: rassurer et diriger.Pour ceux qui ont encore un inconscient colonial ou des complexes de supériorité, cette petite démonstration de sérieux a des vertus purgatives! Pour d’autres, elle est jubilatoire.Il faut regarder et écouter.C’est presque une chronique d’Alexandre Vialatte.