Pour Philon d’Alexandrie et les anciens Thérapeutes, Dieu est «plus qu’Être», meilleur que le Bien, au-delà de l’Un, au-delà de tout. Dieu est no-thing, «pas une chose», l’Être n’est pas «un être», c’est de l’espace, de la clarté, c’est ce qui demeure entre nous, entre tout, le Rien, no-thing, le «pas une chose» d’où naissent toutes les choses.
Il y a en nous, en tout être, un espace, une liberté, un silence qu’il faut préserver. C’est ce que nous avons de plus précieux, c’est peut-être aussi ce qu’il y a de plus fragile dans l’univers. «Nous avons à prendre soin de Dieu pour qu’il ne meure pas», disait Etty Hillesum.
Le Thérapeute, selon Philon d’Alexandrie, est au service de cette vision. Avant toute chose il prend soin d’éveiller notre regard intérieur, capable de voir «ce qui est» dans «ce qui passe». Il nous ramène de l’existentiel à l’essentiel, cet essentiel qui n’est pas une essence abstraite ou un «arrière-monde», mais la Vie de notre vie, le Souffle de notre souffle, la Conscience de notre conscience, l’Être de notre être – là est la soteria, qu’on traduit par «santé» ou encore par «salut», la «Grande Santé».
— Jean-Yves Leloup, L’évidence de l’invisible.