«En ce moment, par exemple, en 1984 (si c’était bien 1984) l’Océania était alliée à l’Estasia et en guerre avec l’Eurasia. Dans aucune émission publique ou privée il n’était admis que les puissances avaient été, à une autre époque, groupées différemment. Winston savait fort bien qu’il y avait seulement quatre ans, l’Océania était en guerre avec l’Estasia et alliée à l’Eurasia. Mais ce n’était qu’un renseignement furtif et frauduleux qu’il avait retenu par hasard parce qu’il ne maîtrisait pas suffisamment sa mémoire. Officiellement, le changement de partenaires n’avait jamais eu lieu. L’Océania était en guerre avec l’Eurasia. L’Océania avait, par conséquent, toujours été en guerre avec l’Eurasia. L’ennemi du moment représentait toujours le mal absolu et il s’ensuivait qu’aucune entente passée ou future avec lui n’était possible. L’effrayant, pensait Winston pour la dix millième fois (…), était que tout pouvait être vrai. Que le Parti puisse étendre le bras vers […]
Les cercles de déni (2/2): caducité de la loi et paronomôn
De nos jours, l’«immunité parlementaire» permet aux députés d’échapper aux conséquences de leurs actions. Dans l’Athènes antique, c’était exactement le contraire: en proposant une loi irrecevable, on mettait sa propre tête en jeu… S’étonnera-t-on si nos régimes, privés de tout contre-pouvoir, sombrent dans le chaos?