Manifestations à Hong Kong: les émeutiers jouent aux dames dans un jeu de go

par | 4.08.2019 | En accès libre, Laurent Schiaparelli, Thé d’Orient

La situation à Hong Kong se dégrade de jour en jour, avec son lot de provocations nouvelles de la part des manifestants, de moins en moins nombreux, et donc de plus en plus radicalisés. Le gouvernement de Hong Kong joue une partie délicate avec des émeutiers soutenus et conseillés depuis l’étranger, qui font feu de tout bois pour pousser la police à la bavure.

Hong Kong: un policier pris à partie par les manifestants

Le projet d’amendement qui a mis le feu aux poudres a été suspendu par le gouvernement, ce qui a eu pour effet que la plupart des citoyens responsables (ceux qui se lèvent le matin pour aller travailler et nourrir une famille, au contraire des émeutiers qui sont désormais presque exclusivement des étudiants et des jeunes désœuvrés), qui pouvaient se sentir solidaires d’un mouvement de protestation sociale, ont cessé de se rendre aux manifestations, et ont été d’autant plus prompts à se désolidariser des revendications du mouvement qu’il s’est radicalisé sous l’influence d’agents étrangers, et n’a plus raison d’être.

Après avoir défilé avec une partie de la population active le week-end, les manifestants sont devenus des émeutiers, ce qu’ils ne peuvent plus nier tant leurs actions sont aujourd’hui exclusivement violentes. Ils s’attaquent désormais en semaine aux usagers du métro pour les empêcher de se rendre à leur travail, mettant ainsi à jour le fossé qui les sépare de la population active, dont une partie les a un instant soutenus, avant de retourner au travail.

Une mise en scène de la violence

Après la destruction de l’Assemblée nationale et le siège de postes de police, les attaques physiques contre la police se multiplient: jets de bouteilles d’acide, doigts arrachés par morsure, lancers de projectiles lourds, utilisation de bâtons et barres de fer, attaques à dix contre un sur des policiers isolés. Les meneurs des manifestations, qui exigeaient il y a quelques semaines que la police et le système judiciaire ne qualifient pas leur mouvement «d’émeutes» ont depuis abandonné cette revendication.

La police a découvert la présence d’explosifs dans un local utilisé par les manifestants. La question est posée sur l’origine de l’entraînement reçu par des étudiants et de jeunes manifestants sur la manipulation d’explosifs, et leur capacité à s’en procurer dans une ville comme Hong Kong. Comme pour les manifestations de 2011 et 2014, tous les regards convergent vers Washington, qui n’en finit pas de s’ingérer dans les affaires de la Chine par communiqués de presse soutenant les manifestants.

Dans un article au titre évocateur (Une tactique de manifestant de Hong Kong: Faire en sorte de se faire frapper par la police), les manifestants avouent que leur tactique, o combien virile, qui consiste à harceler physiquement la police juste assez pour la pousser à les frapper, a pour but de s’attirer la pitié du public et la sympathie des médias occidentaux. Ceci a évidemment pour objectif de contraindre la police à commettre des actes de répression suffisamment télégéniques pour être utilisés par les médias occidentaux, quitte à les exagérer ou les déformer pour pouvoir publier des titres accrocheurs anti-Pékin (alors qu’il s’agit de la police de Hong Kong et que le chef de la garnison de l’Armée populaire de Libération basée à Hong Kong a précisé que sa mission n’était pas de rétablir l’ordre public), qui sont certainement déjà rédigés et prêts à partir sous presse. Il faut du matériau audiovisuel aux médias occidentaux pour pouvoir diffuser au plus fort de l’été des titres accrocheurs comme «Manifestations pacifiques matées dans le sang à Wanchai» ou «Tiananmen 2.0 à Admiralty».

Il est intéressant à cet égard de noter que le New York Times (qui mériterait de s’appeler le Langley Times) a déjà offert des espaces éditoriaux à divers agitateurs de Hong Kong au moins à 13 reprises depuis le début du mouvement (les 10, 13, 15, 17, 28 et 30 juin, parfois deux dans la même édition quotidienne, et les 1, 2, 3, 4, 5, 8 et 12 juillet), sans compter les articles de soutien de politiciens ou journalistes américains. Après une pause de 18 jours, le flot a repris le 30 juillet (avec ceci), selon une technique de propagande journalistique bien rodée de déferlante/silence/reprise des articles à charge, pour faire croire au lectorat crédule que «l’information» colle au cours organique des événements sur le terrain(1).

Les Hongkongais sacrifiés sur l’autel d’un objectif géopolitique impérial?

La présidente de Taïwan, qui doit son élection à Washington, et qui y prend donc ses instructions, a exprimé sa solidarité avec le mouvement dès les premiers jours, et a favorisé la soudaine création d’une Alliance Taïwan-Hong Kong aux objectifs vagues, déplaçant volontairement la discussion du domaine technique de l’extradition de criminels, à celui plus vendeur et volontairement flou de «lutte pour la démocratie». Cette manœuvre politicienne a eu pour effet de la propulser de la troisième à la première place dans les sondages d’opinion sur ses possibilités de réélection à la présidence en 2020.

Taïwan, dont l’industrie du tourisme ne vit que des touristes chinois et japonais, s’est déjà vu privée il y a deux ans d’une grande partie du flot de touristes chinois qui, devant l’hostilité ouverte de la présidente taïwanaise, ont «voté avec leurs pieds» et sont allés dépenser leurs yuans ailleurs, aggravant la récession de l’économie taïwanaise.

Depuis aujourd’hui, c’est une mesure de rétorsion officielle de Beijing: les citoyens des 47 villes chinoises qui étaient autorisés à voyager individuellement à Taïwan ne peuvent désormais plus le faire, et doivent maintenant passer par des agents de voyage officiels.

Autant dire que Taïwan peut faire une croix sur les touristes chinois et leurs devises. Le gouvernement de Taïwan et les quelques Occidentaux qui y sont encore établis peuvent prétendre que cela n’a pas d’importance, les chiffres parlent d’eux-mêmes, puisque la croissance taïwanaise est atone depuis que Tsai Ing-wen est arrivée au gouvernement, et que cela ne fait qu’empirer avec ce soutien incongru aux émeutiers de Hong Kong.

Washington sait pertinemment que Hong Kong est de retour dans le giron chinois pour de bon, et que les tentatives de déstabilisation récurrentes (Occupy Central en 2011-2012, La révolution des parapluies en 2014, et les manifestations de cette année), si elles sont stériles et vouées à l’échec à Hong Kong, peuvent en revanche porter leurs fruits sur l’échiquier international: une diabolisation de la Chine, qui éclipse totalement les États-Unis dans la région Asie-Pacifique, permet de resserrer les liens de plus en plus lâches avec la Corée du Sud et le Japon, justifie la création de bases militaires américaines supplémentaires en Australie et en Papouasie-Nouvelle Guinée, et produit même des dividendes électoraux à Taïwan, un territoire naturellement dans l’orbite de la Chine, et dont le mouvement séparatiste (celui du parti de la présidente en poste) est suicidaire en plus d’être vain. Agiter l’épouvantail d’une Chine agressive est le respirateur artificiel qui maintient en vie le Parti démocratique populaire (indépendantiste) de la présidente Tsai, dont l’électorat est majoritairement jeune, féminin et lgbt (pas toujours simultanément).

Ainsi, les émeutiers hongkongais et leurs naïfs soutiens, qui croient à une pseudo-indépendance de facto de Hong Kong par rapport à la Chine, voire à une indépendance de jure, ne sont que les pions habituels (jeunes yuppies urbains occidentalisés) de l’État profond américain dans toutes les révolutions de couleur qu’il supervise. Un parrain qui n’a que faire de leur bien-être, ne les utilise qu’en tant qu’agents du chaos par procuration, et les oubliera aussi vite qu’il se souvient sporadiquement d’eux quand il y a une opportunité de déstabilisation de la Chine.

NOTE
  1. Sur place, on ne se fait guère d’illusions. Le premier Chief executive hongkongais après la rétrocession, Tung Chee-Hwa, a ainsi déclaré que les émeutes sont pilotées depuis les Etats-Unis et Taiwan.
  • Article de Laurent Schiaparelli paru dans la rubrique «Thé d’Orient» de l’Antipresse n° 192 du 04/08/2019.

On peut aussi lire…

This category can only be viewed by members. To view this category, sign up by purchasing Club-annuel, Nomade-annuel or Lecteur-annuel.

La guerre d’Ukraine est une guerre totale

Il y a la guerre absolue selon Clausewitz, qui de nos jours ne pourrait prendre que la forme du conflit nucléaire. Mais avant elle, il y a la guerre totale, ou l’inclusion de toutes les sphères d’une société dans la conflagration. Comment avons-nous pu en arriver là?

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

Anneke Lucas: itinéraire d’une enfant jetable

A six ans, Anneke Lucas a été vendue à un réseau pédophile. Pendant des années, elle a été exploitée comme esclave et «vestale» sexuelle. Aujourd’hui, elle consacre sa vie à mettre en lumière cette «pyramide de la souffrance» où elle a failli elle-même être ensevelie. Anneke est une survivante et un témoin de premier rang sur l’un des pires maux de l’humanité. Son récit est dur et insoutenable. On peut le rejeter et fermer les yeux sur ce continent caché. Mais on ne peut éviter de se poser la question: et si tout ceci est vrai, dans quel monde vivons-nous en réalité? Cet entretien a été réalisé en septembre 2023.

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

Faire croire à la démocratie: le modèle suisse

La Suisse, cet automne, est en campagne électorale. C’est la promesse de débats sans surprise sur des sujets sans importance. L’important est de célébrer la liturgie démocratique en évitant les fausses notes. Mais que se passerait-il si, dans ces cérémonies bien policées, quelqu’un soulevait une vraie question?

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

L’État: faible ou fort?

Les dirigeants se croyaient en mesure de tout maîtriser, on voit bien aujourd’hui qu’ils ne maîtrisent rien. Ils ont libéré des puissances qui finiront un jour par les emporter, eux comme le reste.

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

eID: le contrôle total de l’humain par les GAFAM?

Pas à pas, de «progrès» en «innovation», de «simplification» en «commodité», la prison numérique tisse son cocon autour de chacun d’entre nous. Ce n’est ni une fiction ni une fatalité. Voici un inventaire des technologies et de procédés dont nous allons «inévitablement» devenir dépendants. Ou pas?

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

Météo d’été

Au début de l’été, la radio d’État en Suisse avait émis un bulletin d’alerte pour orages d’une extrême violence. En fin de compte, la prévision se révéla fausse. Il y eut juste un peu de pluie et quelques coups de tonnerre. Certains protestèrent en reprochant à la météo de mal faire son travail.

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

La légende de Sviajsk

Ce fortin d’où est partie la conquête de Kazan est devenu un grand centre de mission spirituelle, puis une prison et un asile de fous. Le destin de Sviajsk semble contenir à lui seul la folie totalitaire du XXe siècle. On y garde le souvenir de certaines scènes parmi les plus bizarres et les plus diaboliques de la Révolution bolchevique. Deuxième et dernière étape de notre excursion au Tatarstan…

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

Rester dans le coup

Les militaristes estampillés et autres traîneurs de sabre à l’ancienne ne déclenchent que rarement des guerres par accident. Mais on ne saurait en dire autant des pacifistes quand ils virent au bellicisme.

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

Monsieur le ministre s’éclate

L’exemplaire démocratie suisse présente une particularité assez curieuse. Les membres de l’exécutif fédéral, élus par le parlement et non par le peuple, peuvent se retirer au moment qui leur plaît, même le plus inopportun, sans que personne n’en prenne ombrage. Qu’ils aient brillé ou cafouillé dans leur charge, ils sont toujours félicités et souvent attendus par des placards dorés. Ainsi le fringant ministre de la maladie qui nous boucla au temps du Covid, et qui a voulu lui aussi, à la veille de sa retraite, montrer qu’il «reste dans le coup».

L’ANTIPRESSE EST UN ANTIDOTE À LA BÊTISE AMBIANTE

Déjà abonné(e)? Je me connecte.

Pas encore membre? Je m’abonne!

Je veux en savoir plus? Je pose des questions!

L’Antidote!

Chaque dimanche matin dans votre boîte mail, une dose d’air frais et de liberté d’esprit pour la semaine. Pourquoi ne pas vous abonner?

Nous soutenir