Les sans-frontiéristes abhorrent, par définition, la fermeture. Se fermer telle est l’abomination. Ils oublient que ce mot porte en lui tout ce qui «forme» une société et la fait «tenir». Tel est le sens de sa racine indo-européenne dʰer-mo-s («porter»), de dher- («tenir, soutenir, force, robustesse,»), qui donne notamment en latin firmus (ferme) et forma (forme). Être ferme (comme cette «terre ferme» tant espérée des migrants qui traversent la Méditerranée), c’est être stable, constant, fiable. Pas de société sans stabilité ni constance ni confiance, notamment dans la parole donnée. Affirmer («rendre ferme»), ne signifie rien d’autre que «tenir» parole. D’ailleurs, ce champ lexical persiste dans sa forme presqu’originelle indo-européenne en lituanien avec derėti («tenir parole, convenir, se mettre d’accord») en tchèque avec dařit («accomplir, réussir») ou en sanskrit avec dharma («la constance du bon ordre, la vertu, la loi, la protection, etc.»). Pour tenir, faut-il encore «se tenir», et pour cela […]
Connaissons-nous encore la modération?
Le vainqueur pourrait détruire le vaincu une fois qu’il le tient à sa merci. Pourtant il ne le fait pas. Ou du moins, il ne doit pas le faire, selon la tradition militaire et morale. Ce n’est pas qu’une affaire de nobles sentiments. C’est aussi, comme l’on dirait aujourd’hui, pour ne pas «tenter le karma». Voilà une sagesse qu’on tend à oublier…