«Il m’arrive même de tenir pour un privilège d’avoir pu assister sur place à un changement de civilisation, même pays, même population, disons au passage de la France-République à la France-entreprise, d’une nation tribunitienne et méditerranéenne à une province transatlantique et semi-anglophone, des sociétés de pensée aux think tanks. Aucun citoyen de l’Antiquité n’a pu voir en direct la Rome du forum devenir celle des basiliques. Je fais simplement le constat d’une inaptitude personnelle à me rendre utile dans ce nouveau bocal. Avec le sentiment, comme vous dites, d’avoir sauté en une vie de l’adolescence à l’obsolescence sans passer par la maturité, un peu comme ces villes du Brésil décrites par Lévi-Strauss qui passaient directement de l’état de chantier à l’état de vestige.» — Régis Debray Observe. Analyse. Intervient.L’Antipresse ne dort jamais. Restons en contact! J’y vais! Merci! Nous vous envoyons de ce pas un message de confirmation!
La dénatalité et ses causes
C’est le paramètre fondamental de la vitalité — et du déclin — d’une société, et pourtant on ose à peine le mentionner, encore moins l’affronter dans sa dure réalité. L’effondrement démographique de l’Europe est patent, on lui affecte des causes imaginaires et des remèdes absurdes que la propagande entoure ensuite de tabous. Si l’on essayait de l’observer, l’espace d’un instant, en faisant fi de ces barrières? La baisse du taux de fécondité en Europe n’est pas en elle-même une nouveauté, elle remonte aux années soixante du siècle dernier, mais on a presque aujourd’hui atteint le plancher. En Suisse, par exemple, ce taux s’est établi en 2022 à 1,39. C’est un peu plus haut encore que dans des pays comme l’Italie et l’Espagne, où il est inférieur à 1, mais à peine. Rappelons que le seuil à atteindre pour le renouvellement des générations est de 2,1. Autrement dit, il faut un […]