Au commencement, je vous disais que le scandale de la création n’était pas la souffrance, mais la liberté. J’aurais pu aussi bien dire l’Amour. Si les mots avaient gardé leur sens, je dirais que la Création est un drame de l’Amour. Les moralistes considèrent volontiers la sainteté comme un luxe. Elle est une nécessité. Aussi longtemps que la charité ne s’est pas trop refroidie dans le monde, aussi longtemps que le monde a eu son compte de saints, certaines vérités ont pu être oubliées. Elles reparaissent aujourd’hui comme le roc à marée basse. C’est la sainteté, ce sont les saints qui maintiennent cette vie intérieure sans laquelle l’humanité se dégradera jusqu’à périr. C’est dans sa propre vie intérieure en effet que l’homme trouve les ressources nécessaires pour échapper à la barbarie ou à un danger pire que la barbarie, la servitude bestiale de la fourmilière totalitaire. Oh! Sans doute, on pourrait croire que ce n’est plus l’heure des saints, que l’heure des saints est passée. Mais, comme je l’écrivais jadis, l’heure des saints vient toujours.
— Georges Bernanos, «Nos amis les saints», Conférence prononcée à Tunis en 1947.
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