Donneraient-ils de fausses réponses, comme à l’école? Mais leur rôle n’est-il point plutôt de poser les bonnes questions? C’est là qu’est leur faux-pas: ne pouvant tenir, par métier, la fausse promesse d’un réel «objectif», ils en faussent le jeu, par conviction. Ils auront beau se défausser de toute allégeance politique, une telle fiction finit un jour faillant par les prendre en défaut. Qu’ils jouent de faux-semblants n’en fait pas pour autant des faux-jetons. C’est sans fausse modestie qu’ils se plaisent au jeu des porte-à-faux. Mais choisit-on de, contre eux, s’inscrire en faux, tels d’anciens fausseurs, qu’on est assuré d’un faux-feu. Car les grands médias ne jouent plus les juges du faux et du vrai mais du «fake». Un faux-ami venant du vieux norrois fága pour «poli, brillant, clinquant», d’où le sens figuré de «pacotille, artificiel». Un champ sémantique néanmoins relié au «faux» par la morale. Dès lors que les grands médias ne sont plus garants que du brillant bon ton, c’est au nom de leur morale qu’ils atournent les causes […]
Différer l’effondrement
Pour expliquer les bruits de bottes actuels en Europe occidentale, on évoque volontiers, afin de les banaliser, le précédent de la guerre froide, qui s’est achevé en 1989 avec la chute du mur de Berlin. En réalité, la comparaison ne mène pas très loin. On peut la tenter, mais ce sont surtout alors les différences qui retiennent l’attention.