Pain de méninges
Du détachement
Il t’appartient d’agir sans jamais un regard Pour les fruits de l’action Ne fais jamais des fruits de l’action ton mobile Demeure égal dans le succès comme dans l’insuccès C’est cette égalité même qui est détachement intérieur Vois d’un œil égal souffrance et plaisir Richesse et misère, défaite et victoire, Tiens-toi prêt au combat, Lorsque ta conscience aura traversé Le Labyrinthe des ténèbres, Tu n’auras plus besoin de savoir Ce qui se dit et ce qui se dira — La Bhagavad Gîtâ
Dieu aime les fous
«Il y a donc tout lieu de croire que Dieu a d’excellentes raisons pour aimer les fous; ce sont les mêmes sans doute qui rendent suspects aux princes de la terre les gens trop sensés. César, qui méprisait cet ivrogne, d’Antoine, redoutait au contraire Brutus et Cassius. Sénèque déplaisait à Néron et Platon à Denys de Syracuse. Les esprits simples et un tantinet idiots sont honorés de la faveur des grands. C’est ainsi que le Christ montre son aversion pour ces philosophes qui ont foi en leur sagesse et qu’il les condamne. J’en prends encore ici Paul à témoin, lorsqu’il écrit: «Dieu a choisi ce qu’il y a de plus fou aux yeux du monde…» et plus loin: «… Dieu a voulu que le monde fût sauvé par la Folie.» Assurément c’est qu’il ne pouvait le faire par la sagesse. Ce qu’il met dans la bouche de son prophète ne […]
Trop de livres, trop d’auteurs…
«Je crains que les hommes ne retombent dans la barbarie, à quoi cette horrible masse de livres qui va toujours en augmentant pourrait contribuer beaucoup, car enfin le désordre se rendra presque insurmontable; la multitude des auteurs, qui deviendra infinie en peu de temps, les exposera tous au danger d’un oubli général.» — Leibniz, Préceptes pour avancer les sciences.
De l’engagement
«Tant que vous ne vous engagez pas, il y a hésitation, la possibilité de se rétracter demeure et l’inefficacité domine. En ce qui concerne tous les actes d’initiatives et de création, il est une vérité élémentaire dont l’ignorance élimine d’innombrables idées et fait avorter des projets splendides: Dès le moment où l’on s’engage pleinement, la providence se met également en marche. Pour vous aider, se mettent en oeuvre toutes sortes de choses, qui sinon n’auraient jamais eu lieu. Tout un flot d’évènements découlent de cette décision, créant en votre faveur toutes sortes d’incidents imprévus, des rencontres et des aides matérielles que vous n’auriez jamais rêvé de voir sur votre chemin. J’ai acquis un respect profond pour un des couplets de Goethe: “Quoi que vous puissiez faire ou rêver, vous pouvez le faire, commencez. L’audace a du génie, de la puissance et de la magie.”» — W. H. Murray, The Scottish […]
De l’humain à l’androïde
«Nous sommes en voie de fusionner progressivement, jusqu’à atteindre un état homogène, avec nos simulacres mécaniques — pas à pas, mois après mois, tant et si bien qu’on peut imaginer une époque pas très lointaine où, par exemple, un écrivain s’arrêtera d’écrire non pas parce qu’on vient de débrancher sa machine à écrire électrique, mais parce que c’est lui qu’on vient de débrancher.» — Philip K. Dick, Si ce monde vous déplaît… et autres écrits, Editions de l’Eclat.
L’illusion de la liberté
«Le monde a proclamé la liberté, ces dernières années surtout; mais que représente cette liberté? Rien que l’esclavage et le suicide! Car le monde “Tu as des besoins, assouvis-les, tu possèdes les mêmes droits que les grands, et les riches. Ne crains donc pas de les assouvir, accrois-les même”; voilà ce qu’on enseigne maintenant. Telle est leur conception de la liberté. Et que résulte-t-il de ce droit à accroître les besoins? Chez les riches, la solitude et le suicide spirituel; chez les pauvres, l’envie et le meurtre, car on a conféré des droits, mais on n’a pas encore indiqué les moyens d’assouvir les besoins. On assure que le monde, en abrégeant les distances, en transmettant la pensée dans les airs, s’unira toujours davantage, que la fraternité régnera. Hélas! ne croyez pas à cette union des hommes. Concevant la liberté comme l’accroissement des besoins et leur prompte satisfaction, ils altèrent leur […]
De la ruse chez les femmes
«Seules les femmes plus ou moins bornées savent ruser et s’en servent. Faute d’une intelligence directe, elles agissent au moyen de la ruse sur les ressorts de leur petite vie quotidienne; elles tissent, comme une dentelle, leur politique domestique, sans remarquer comment les grandes lignes de la vie s’organisent autour d’elles, où elles se dirigent et où elles se rejoignent. La ruse est comme une petite pièce de monnaie qui ne permet pas d’acheter beaucoup. Tout comme un petit sou peut faire vivre une heure ou deux, la ruse permet tout juste de petites cachotteries, de petites tromperies, des victoires de petite envergure, mais elle ne saurait embrasser du regard l’horizon, ni lier le début et la fin d’un événement capital, essentiel. La ruse est myope: elle ne voit pas plus loin que son nez. Voici pourquoi elle tombe souvent dans le piège qu’elle tend aux autres.» — Ivan Gontcharov, […]
L’incohérence qui sauve
«Ce n’est que dans ses phrases éparses et contradictoires que l’homme parvient à se rassembler, à devenir entier sans perdre l’essentiel, à se répéter, à se respirer, à expérimenter ses gestes, à fonder son accent, à essayer ses masques, à craindre ses vérités, à découvrir des vérités dans les fumées de ses mensonges, à se fâcher à mort et à disparaître rajeuni.» — Elias Canetti, Le livre contre la mort, éd. Albin Michel.
Qu’est-ce que la mémoire?
«La mémoire est la base de la personnalité individuelle, tout comme la tradition est la base de la personnalité collective d’un peuple. Nous vivons dans la mémoire et par la mémoire, et notre vie spirituelle, dans le fond, n’est que l’effort consenti par notre mémoire pour durer, pour se transformer en espérance, l’effort de notre passé pour se transformer en notre avenir.» — Miguel de Unamuno